En avant première, une interview qui sera publiée demain sur le Site Internet Legal Easy. link
Ci-après, une reproduction.
L’entretien annuel est-il obligatoire en entreprise ?
Si l’entretien annuel est un outil indispensable d’évaluation des salariés et qu’il permet d’instaurer un dialogue entre les employés et leur hiérarchie, il n’est imposé par la loi que dans certains cas.
Un entretien annuel individuel doit, par exemple, être organisé avec chaque salarié ayant conclu une convention de forfait en jours sur l’année (Article L. 3121-46 du Code du Travail). Une convention de forfait est un accord employeur/employé par lequel est définie une durée de travail au-delà de la durée légale ou équivalente, assortie d’une rémunération forfaitaire.
L’entretien annuel est, également, obligatoire à l’issue d’un congé maternité ou d’un congé parental (Article L. 1225-27 du Code du Travail).
L’employeur est aussi tenu de mettre en place un entretien professionnel tous les 2 ans sur la formation avec tous les salariés ayant au moins 2 ans d’ancienneté (Accord National Interprofessionnel du 05/12/03 repris dans celui du 13/10/05).
Cet accord prévoit en outre que, dans les entreprises d’au moins 50 salariés, l’employeur doit organiser dans l’année suivant le 45ème anniversaire d’un salarié un entretien professionnel afin de l’informer, notamment, sur ses droits en matière d’accès au bilan d’étape professionnel, au bilan de compétences ou à une action de professionnalisation (autrement appelé « entretien de 2ème partie de carrière »).
En dehors de ces cas, la mise en place des entretiens annuels n’est qu’une faculté pour l’employeur. Il n’existe donc pas de sanction si l’employeur décide de ne pas user de cette possibilité.
La question de l’entretien annuel a-t-elle été traitée en jurisprudence ?
Pendant longtemps, la question de l’entretien annuel d’évaluation n’a pas été traitée par la jurisprudence.
Mais, en l’absence d’encadrement légal, la jurisprudence a permis, au fil des années, de plus en plus finement, d’encadrer le déroulement ainsi que le mode de mise en place des entretiens d’évaluation et ce, en réponse aux besoins grandissants des acteurs économiques en matière d’évaluation et de communication.
A titre d’exemple, il a été jugé que l’évaluation ne pouvait reposer que sur des critères objectifs (Cass. Soc. 9/04/02, TGI Versailles 28/10/10). Les Tribunaux ont pu analyser le défaut de consultation des organes de l’entreprise (CHSCT) comme un trouble manifestement illicite (Cass. Soc. 10/04/08) etc… La jurisprudence est désormais abondamment fournie en la matière.
Que se passe-t-il si le salarié convoqué s’y oppose, et ne s’y présente pas ?
La demande émanant du supérieur hiérarchique auquel est rattaché le salarié est une directive qui doit être respectée. Il s’agit de l’essence même du contrat de travail. L’employeur tient de son pouvoir de direction, né du dit contrat, le droit d’évaluer le travail de ses salariés (Cass. Soc. 10/07/02).
Dès lors que la procédure a été régulièrement mise en place (consultation préalable du CE, information des salariés, consultation CHSCT en cas d’aménagement important), le salarié ne peut refuser de se soumettre à cet entretien annuel. Caractérisé comme un acte d’insubordination (CA Paris 14/01/98), il peut constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement (CA Riom 18/12/07) si le salarié persiste, par exemple, à refuser l’entretien après une mise en demeure ou un avertissement.
Le salarié peut-il refuser de signer le compte-rendu qui lui est soumis ?
Peu de décision ont été rendues sur ce point. Il serait légitime de penser que le simple refus de contresigner un compte-rendu d’évaluation ne pourrait être considéré comme fautif. L’employeur peut, en effet, librement fournir un bilan au salarié sans que ce dernier y appose sa signature.
Le refus de signer du salarié sera plutôt interprété comme son désaccord sur les termes du compte-rendu, d’où l’intérêt de prévoir la possibilité pour lui d’exprimer par écrit sur le rapport les points qu’il conteste.
Le refus de signer ne peut, en tout cas, en l’état actuel de la jurisprudence, être fautif ni justifier une mise à pied (CA Chambéry 19/01/2010) ni un licenciement (CA Versailles 09/10/2008).
Conclusion
Il résulte des dispositions de l’Article L. 1222-3 du Code du Travail que les résultats des entretiens d’évaluation sont confidentiels. Y est seulement visée la confidentialité de la teneur de l’entretien d’évaluation à l’égard des tiers. C’est ainsi que ce principe ne peut être opposé au salarié qui peut très bien avoir accès sur demande aux résultats (comme a pu le préciser la CNIL considérant en effet que les données communicables ont été prises en compte dans la prise de décisions à son égard : augmentation salariale, fixation ou redéfinition des objectifs, promotion, mutation, avertissement etc…).