Avec l’assassinat de Samuel Paty, professeur d’histoire-géographie, le 16 octobre dernier à Conflans-Sainte-Honorine dans les Yvelines, se pose à nouveau la question de la liberté d’expression sur fond de débats internationaux sur la laïcité.
La liberté d’expression
Il convient de rappeler les contours de la liberté d’expression.
Notion consacrée par l’article 11 de la déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, la liberté d’expression est une liberté fondamentale, toutefois limitée par plusieurs délits évoqués dans la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse.
Ainsi, l’injure, la diffamation, la provocation aux crimes et délits, les outrages portant atteintes à la fonction sont des limites à la liberté d’expression.
La loi de 1881, dans sa version originelle, comportait un délit d’outrage aux bonnes moeurs et à la décence publique, peu adaptée à l’évolution de la société. Ce délit a été abrogé en 1994 et remplacé par l’article 227-24 du Code Pénal qui punit “la fabrication, la diffusion ou le transport de message à caractère violent, incitant au terrorisme, pornographique ou de nature à porter gravement atteinte à la dignité humaine.”
Une infraction spécifique pour l’apologie au terrorisme.
En 2014, une loi est venue durcir les sanctions des délits d’apologie du terrorisme et de provocation au terrorisme commis sur Internet à des délits terroristes.
Cette loi toujours, permet la suppression des sites internet faisant l’apologie du terrorisme ou y provoquant. Une loi de 2017 permet la fermeture administrative des lieux de culte dès lors que des messages incitant à la discrimination, à la haine, à la violence, à la commission d’actes de terrorisme y sont diffusés.
Le blasphème n’est pas un délit
Le blasphème, défini par le Larousse comme une “parole ou [un] discours qui outrage la divinité, la religion ou ce qui est considéré comme respectable ou sacré” fut longtemps un délit. Celui-ci a été abrogé par la loi de 1881.
Ainsi, en France, comme nous l’avons rappelé dans notre article consacré à l’affaire Mila, il est possible de critiquer une religion.
Il est en revanche interdit de critiquer, d’insulter les adeptes d’une religion. On retrouve ici le délit de diffamation.
La laïcité
La laïcité est un mot qui n’est pas traduisible dans tous les pays du monde et même en Europe, puisque le mot lui-même n’existe qu’en France presque exclusivement.
La laïcité désigne la séparation de l’Église et de l’État et en conséquence, l’égalité de chacun devant la loi, quelque soit sa religion. La liberté de conscience est le corollaire de cette laïcité, chacun peut avoir une religion et l’exercer tel qu’il le souhaite dans le cadre de la loi.
La laïcité en France est issue de la Révolution Française. Ainsi, la déclaration des droits de l’homme et du citoyen affirme l’égalité devant la loi de tous les citoyens.
Si la séparation du fait religieux et de l’Etat n’est pas une spécificité française, la laïcité telle qu’elle existe dans notre pays va au-delà. Elle est régie par trois principes : la neutralité de l’État, la liberté de conscience et le pluralisme religieux.
Elle s’applique dans de nombreux secteurs : la santé, la famille, la vie publique et l’éducation.
Dans ce domaine en particulier, la laïcité du système scolaire a été instaurée par la loi de 1905 sur la laïcité de l’État. Elle a été réaffirmée en 2013 par la Charte de la laïcité à l’École.
Ainsi, la liberté d’expression et la laïcité sont des valeurs fondamentales en France.
Pour autant, si la liberté d’expression n’est pas absolue, elle est mise en danger par les actes terroristes que la France subit ces dernières années et la pression des islamistes.
Qu’en sera-t-il si les professeurs s’auto-censurent par peur des représailles ? La laïcité ne risque-t-elle pas d’être elle-même en danger ?
Ces questions sont difficiles, preuve en sont les images diffusées de certains pays appelant au boycott de produits français, mais il est indispensable de les poser et d’en rappeler encore et encore les contours. La liberté d’expression et la laïcité sont le socle du vivre ensemble, n’en déplaise à certains.