Telle est la question qui s’est posée récemment, alors que plusieurs députés Les Républicains et une parlementaire La République en Marche aient quitté une audition au prétexte du voile porté par la présidente d’un syndicat étudiant.
Les faits
Le 17 septembre dernier, auditionnée sur les problématiques étudiantes pour cause de Covid-19, la vice-présidente de l’Unef, Maryam Pougetoux, a été prise à partie, coupée dans ses déclarations, par plusieurs membres de l’hémicycle dénonçant un “acte de communautarisme délibéré”.
La députée LREM Anne-Christine Lang, a twitté au sortir de la salle : “Attachée aux valeurs républicaines, à la laïcité et aux droits des femmes, je ne peux accepter qu’une personne vienne participer à nos travaux en hijab, qui reste pour moi une marque de soumission.”
Le volet juridique : le voile est-il autorisé à l’Assemblée Nationale ?
Après avoir retracé les faits, penchons-nous sur le volet juridique. Que disent les textes ?
Il est important tout d’abord, puisque le mot a été utilisé par Anne-Christine Lang, de voir ce que recouvre le mot laïcité.
Sur le site du gouvernement, nous trouvons que la laïcité est “la liberté de manifester ses croyances ou convictions dans les limites du respect de l’ordre public. La laïcité implique la neutralité de l’Etat et impose l’égalité de tous devant la loi sans distinction de religion ou conviction.”
Quid de laïcité côté vestimentaire ? Il faut savoir que celle-ci s’applique différemment à deux catégories d’individus, les agents publics et les usagers du service public.
Les premiers sont contraints à une neutralité vestimentaire (politique, religieuse, publicitaire …) tandis que les seconds ne sont pas soumis à cette neutralité à condition que leur tenue ne perturbe pas l’ordre public.
Les élus de l’Assemblée Nationale sous soumis de leur côté à une contrainte vestimentaire issue de l’article 9 de l’Instruction Générale du Bureau de l’Assemblée Générale : “la tenue vestimentaire adoptée par les députés dans l’hémicycle doit rester neutre et s’apparenter à une tenue de ville. Elle ne saurait être le prétexte à la manifestation de l’expression d’une quelconque opinion : est ainsi notamment prohibé le port de tout signe, religieux ostensible, d’un uniforme, de logos ou messages commerciaux ou de slogans de nature politique.”
L’article 8, quant à lui, précise les tenues autorisées du public : “pour être admis dans les tribunes, le public doit porter une tenue correcte. Il se tient assis, découvert et en silence ; il peut consulter les documents parlementaires et prendre des notes.”
Le service de presse de l’Assemblée a tenu à préciser cet article et notamment le mot “découvert” qui peut-être sujet à interprétation : “L’article 8 qui dispose que le public qui assiste aux séances se tient “découvert” n’est pas interprété à la lettre. Le port de tenues manifestant une appartenance religieuse n’est pas en soi interdit. Ce n’est que dans le cas où le président de séance estimerait que le port de telles tenues est de nature à troubler l’ordre ou le bon déroulement des débats qu’il pourrait être amené à prendre des mesures. Cette tolérance permet d’accueillir en tribune des députées ou d’autres invitées étrangères voilées.”
Ainsi, la question du port du voile à l’Assemblée est très clairement traitée par les textes et par les services de l’hémicycle eux-même : rien n’empêche à une personne auditionnée dans les espaces de l’Assemblée de porter un voile, ce qu’en convient parfaitement la députée citée précédemment d’ailleurs qui admet que le débat se pose ailleurs.
La question soulevée est bien de l’ordre des convictions personnelles. Reste à savoir si celles-ci ont le droit de cité au sein de l’Assemblée Nationale ?